Bibracte est une ville éphémère, qui n’a vécu que l’espace d’un siècle, à cheval sur le IIe et le Ier siècle avant notre ère. Un siècle qui sépare sa fondation de son abandon au profit d’Augustodunum (Autun).
L'âge d'or de Bibracte
Une ville éphémère
Capitale du peuple des Éduens, elle a compté entre 5 000 et 10 000 habitants, a été une plaque tournante pour l’artisanat et les échanges commerciaux, a vu la proclamation de Vercingétorix à la tête de la coalition gauloise à l’été 52 avant notre ère et l’installation, le temps d’un hiver, de Jules César, qui y rédigea une partie de ses Commentaires sur la Guerre des Gaules.
Bibracte fut le lieu et le témoin d’une transformation radicale des sociétés d’Europe occidentale, avec l’apparition des oppida, ces villes entourées de rempart, dont Bibracte est l’une des plus caractéristiques et des mieux préservées, avec son double rempart et ses quartiers s’étendant sur 200 hectares.
L’un des principaux acquis des recherches archéologiques du 19e siècle est d’avoir montré que la ville gauloise était un important centre artisanal, plus particulièrement le quartier situé en arrière de la Porte du Rebout. Ici, dans des ateliers, plusieurs générations d’artisans façonnent le fer et les alliages cuivreux pour fabriquer des fibules par milliers, des outils, des armes, des monnaies, des ornements en métal émaillé, négociés sur le marché régional, voire au-delà.
Bibracte est d’ailleurs un important centre commercial, comme en témoignent les monnaies, locales ou lointaines, retrouvées sur le site. C’est un carrefour où s'échangent et se consomment denrées importées et produits artisanaux.
C’est également une capitale politique, présentée par César comme « le plus grand et le plus riche oppidum des Éduens ». Elle accueille durant l’été de 52 avant notre ère l’assemblée des chefs gaulois qui confirme le commandement de Vercingétorix, avant d’être choisie, quelques mois plus tard, par César, pour y installer ses quartiers d’hiver, après sa victoire à Alésia.
Bibracte endormie
La ville abandonnée
Après le départ de ses habitants pour la ville d'Autun, dans les décennies qui encadrent le changement d’ère, Bibracte ne meurt pas tout à fait. Mais elle s'endort.
Ne subsistent plus sur le mont Beuvray que quelques lieux de culte, et des sources qui continuent d’être fréquentées. Les habitations, sans disparaître complètement, sont très dispersées.
Après les siècles mal documentés du début du Moyen âge, le mont Beuvray réapparaît dans les textes comme le lieu de foires qui se déroulent le premier mercredi de mai. Ces foires, qui perdurent jusqu'à la première Guerre mondiale, sont encore vivaces dans la mémoire locale.
Au début du 15e siècle, un couvent franciscain s'installe en contrebas du sommet et accueille une quinzaine de moines. Cet établissement subsiste jusqu’au début du XVIIIe siècle, malgré deux destructions pendant les guerres de Religion.
La redécouverte
Au 19e siècle vient le temps des archéologues...
Au 19e siècle vient le temps des archéologues. C’est celui d’une redécouverte qui s’opère au gré des préoccupation politiques et des mythes historiographiques du moment.
Tout commence lorsque Napoléon III décide d'écrire Une Histoire de Jules César. Il fait alors engager des recherches pour déterminer où se situent Alésia ou Gergovie et finance de vastes programmes de fouilles archéologiques. Un négociant en vin d'Autun, Jacques-Gabriel Bulliot, très érudit, est quant à lui persuadé que Bibracte se situe sur le mont Beuvray, et non à Autun, comme on le pense alors. En 1867, il bénéficie du soutien financier de Napoléon III et met en place des campagnes de fouilles qu'il va superviser pendant près de 30 ans.
Ces fouilles, qu'il documente avec précision dans des carnets de terrain, permettent de dégager des maisons, des ateliers, des bâtiments publics, et de recueillir des milliers d'objets ou de fragments, qui seront répartis entre le musée d'Autun et celui des Antiquités nationales, à St-Germain-en-Laye.
Bulliot laisse par la suite la direction des recherches à son neveu, Joseph Déchelette. Grand voyageur, c'est lui qui établit que certains objets découverts à Bibracte sont identiques à d'autres, trouvés en Bavière, en Hongrie ou en Bohême et qui démontre qu'il existe une « civilisation des oppida », qui s’étend sur une vaste partie de l'Europe. Considéré comme un des pères de l’archéologie protohistorique, on lui doit un monumental manuel d’archéologie européenne. Sa mort sur le front de la Première guerre mondiale, en 1914, sonne l'arrêt des recherches à Bibracte.
Malgré le départ des archéologues, le mont Beuvray demeure pour la population locale un lieu de promenade dominicale, de fêtes et de foires agricoles.
Aujourd'hui
Un site archéologique qui se dévoile
Aujourd’hui, Bibracte est un lieu où se croisent chercheurs, fouilleurs, touristes et promeneurs. Siège d’un patrimoine ancestral témoin d’une importante page de l’Histoire européenne, il est aussi un des sites archéologiques les plus dynamiques de ce siècle, résolument tourné vers l’avenir.
A la mort de Déchelette sur le front en 1914, les recherches archéologiques sur le mont Beuvray prennent fin, jusqu'en 1984 où, à l'initiative des archéologues, soutenus par le président de la République François Mitterrand, elles redémarrent. Le site fait donc l'objet de fouilles chaque année depuis lors.
Seuls 5 % du site ont été fouillés à l'heure actuelle. Il reste donc encore fort à faire, directement sur le terrain ou par l'intermédiaire des nouvelles technologies, pour avoir une vision détaillée du fonctionnement de la ville antique. C'est à cela que se consacrent les équipes universitaires présentes chaque été, aussi bien en fouilles que dans les salles de travail du centre archéologique.
Et, si ses hivers demeurent calmes, le site est animé en été d'une foule de visiteurs, venus chercher sur ce mont Beuvray, Grand Site de France, l'air pur, les promenades au milieu des hêtres centenaires, le souvenir de la ville antique et un moment d'Histoire.
Chaque saison, un programme d'action culturelle riche et varié anime le site de visites guidées, ateliers, concerts, conférences et propositions d’artistes. Le musée, qui accueille près de 50 000 visiteurs par an, fait de Bibracte un lieu de culture incontournable en Bourgogne.