La communauté de communes de la vallée de la Bruche, dans le Bas-Rhin, est réputée pour le projet de territoire qu’elle mène depuis trente ans autour de la thématique structurante du paysage. La vallée avait été touchée de plein fouet par la crise des années 1970 et la fermeture des usines textiles qui la jalonnaient, entraînant la fermeture rapide du paysage : la population d’ouvriers-paysans avait planté ses prairies en sapins avant de déserter la vallée.
Les abords du Mont-Beuvray étant affectés aujourd’hui par un phénomène similaire de fermeture du paysage en raison de la déprise agricole, une délégation d’élus, d’agriculteurs et de techniciens du Morvan se sont rendus à l’automne 2015 à la rencontre des acteurs de la vallée de la Bruche. Elle était revenue enthousiasmée par l’initiative collective qu’elle avait pu découvrir à cette occasion et avait proposé à ses interlocuteurs de venir découvrir le Mont-Beuvray et le Morvan. C’est ainsi qu’un groupe d’une douzaine de personnes, mené par le président de la Communauté de communes de la vallée de la Bruche, Pierre Grandadam, est venu découvrir le site et ses paysages, et surtout rencontrer les acteurs locaux, du 7 au 9 septembre.
Visites d’exploitations agricoles et en forêt, sans oublier le musée de Bibracte, tables-rondes sur l’agriculture et le tourisme ont permis de croiser les expériences sur des thématiques partagées par les deux territoires. Cette expérience réussie, dont témoignent avec conviction et enthousiasme ses acteurs, est essentielle pour les gestionnaires du Grand Site et ses partenaires : elle montre qu’un projet intégré de territoire est possible, qui bénéficie à la fois à la qualité du paysage, au développement de l’économie agricole et à l’attractivité touristique, tout en renforçant la solidarité des habitants.
Une photographie de l’agriculture aux abords du Mont-Beuvray
A l’occasion du renouvellement pour six ans du label Grand Site de France, en 2013, Bibracte EPCC et le Parc naturel régional du Morvan se sont engagés vis-à-vis du ministère de l’Environnement à mener des actions en faveur du paysage aux abords du Mont-Beuvray, qui évolue de façon rapide et incontrôlée dans un sens perçu négativement par la grande majorité des habitants : fermeture des espaces agricoles abandonnés, conduite brutale de l’exploitation forestière avec des moyens mécaniques toujours accrus. En accord avec les partenaires concernés (élus, services de l’Etat, représentants professionnels…), il a été décidé de mener collégialement un diagnostic paysager et agricole afin d’appuyer les futures actions sur une analyse partagée des enjeux.
Le diagnostic paysager a été confié début 2016 au paysagiste Claude Chazelle qui, avec son équipe, accompagne Bibracte depuis plus de quinze ans. Son travail est actuellement avancé et des réunions ouvertes à tous les habitants permettent, depuis l’été, de partager son analyse et de l’enrichir du regard des acteurs locaux.
Pour ce qui concerne le diagnostic agricole, le choix a été de confier l’enquête à une étudiante de l’école d’ingénieurs agricoles AGROSUP Dijon, Chloé Gond, dont le travail a été suivi et encadré pas à pas par un groupe d’experts comprenant des représentants des Chambres d’Agriculture de la Nièvre et de le Saône-et-Loire, plusieurs chargés de mission du Parc du Morvan et des chercheurs agronomes et anthropologues du labex ITEM (laboratoires de recherche de Grenoble et Chambéry spécialisés sur les milieux de montagne) qui accompagnent Bibracte et le Parc dans cette démarche depuis plusieurs années.
Sur un total de 53 exploitations agricoles identifiées dans un périmètre d’étude d’environ 17.000 ha, Chloé Gond a eu la possibilité de rencontrer et d’interroger de façon approfondie 45 chefs d’exploitation entre mars et août. C’est déjà un beau succès et une grande satisfaction que la très grande majorité des agriculteurs aient accepté de jouer le jeu et de partager les paramètres de leur exploitation, quand bien même ceux-ci témoignent de difficultés à exercer leur métier dans un contexte de plus en plus difficile – il n’est qu’à penser à la chute du prix de la viande, qui a un impact très fort sur la grande majorité des exploitations de notre secteur, dédiées souvent exclusivement à la vente de veaux « maigres » en subissant les tarifs d’un marché globalisé.
A l’issue de la présentation du diagnostic agricole, les participants à la réunion se sont retrouvés sur l’exploitation de Jérôme Mariller, un jeune éleveur de Saint-Léger-sous-Beuvray qui avait pour l’occasion mis sur la broche deux de ses agneaux.