Les membres du jury présents ont délibéré pour décerner ce 4e prix à Thibaud Poigt.
Originaire du village de Hastingues dans les Landes, Thibaud Poigt s’intéresse dès l’enfance aux vestiges matériels des époques anciennes. Après une formation scientifique au lycée, il intègre en 2007 la Licence d’Histoire de l’Art et d’Archéologie de l’Université Bordeaux Montaigne.
Il se forme ensuite à la recherche et au travail de terrain, notamment auprès d’Alexis Gorgues sur le site de Malvieu (Saint-Pons-de-Thomières, Hérault). C’est à ses côtés qu’il se lance dans un mémoire de Master, sur les marqueurs de pratiques de production et d’échange déposés en contexte funéraire au cours de l’âge du Fer. Avec déjà une dimension européenne, puisqu’il travaille sur les territoires français et espagnols. Ce travail universitaire l’amène à étudier des poids de balance, déposés dans des tombes de la période Ibérique sur le littoral valencien. Il constate alors l’hétérogénéité des données sur le sujet à l’échelle européenne : le sujet de sa thèse est alors trouvé ! Il écrit un premier projet de recherche en 2013, puis s’inscrit en thèse sans financement à l’université Toulouse Jean-Jaurès en 2014, sous la co-direction de Pierre-Yves Milcent et d’Alexis Gorgues. En 2015, il décroche une bourse d’un mois de la Casa de Velázquez (Madrid) qui lui permet de sillonner l’Espagne pour étudier des instruments de pesée conservés dans différents musées et collections. L’année suivante, il intègre l’Ecole des Hautes Etudes Hispaniques et Ibériques (EHEHI) de la Casa de Velázquez en tant que membre pour une durée de deux ans. Il soutient finalement sa thèse en septembre 2019, et la publie au printemps 2022 dans la collection numérique Dan@ des Editions Ausonius.
Sa thèse a pour objet : Les instruments de pesée en Europe occidentale aux Âges des Métaux (XIVe-IIIe s. av. n.è.). Conception, usages et utilisateurs. Le jury du prix a apprécié cette thèse originale autant par son sujet que par le protocole d’analyse mis en place. Elle propose en effet une vision renouvelée des échanges et de l’économie des sociétés protohistoriques, en développant une approche archéologique et anthropologique subtile pour appréhender l’histoire longue des modalités de mesure de la valeur dans les sociétés dépourvues d’écriture et de systèmes monétaires institutionnalisés.
Le jury a aussi particulièrement été convaincu par l’ambition proposée par le lauréat pour les nouvelles recherches qu’il compte développer dans le prolongement de son doctorat, ainsi que par l’adéquation parfaite de son dossier aux valeurs associées aux prix Joseph-Déchelette : dimension européenne de la réflexion, sens pratique, rigueur intellectuelle. Le jury note encore que le lauréat est très investi dans la vie de la communauté scientifique, au moyen de publications et de nombreuses interventions lors de colloques.
Le jury du 4e prix Joseph Déchelette était composé de :
• Anne-Marie Adam, professeur émérite à l’université de Strasbourg, présidente du conseil scientifique de Bibracte, représentant Bibracte, présidente du jury
• Sophia Adams, conservatrice au British Museum, membre du conseil de la Prehistoric Society, représentant celle-ci
• Philippe Barral, professeur à l’université de Franche-Comté, président de l’association française pour l’étude de l’âge du Fer (AFEAF), représentant l’AFEAF
• Gilles Déchelette, président de l’association Joseph Déchelette, représentant l’association
• François Fichet de Clairfontaine, inspecteur général de l’architecture et du patrimoine, représentant le ministère de la Culture
• José Gomez de Soto, directeur de recherches émérite au CNRS, représentant la Société préhistorique française
• Marc-Antoine Kaeser, professeur titulaire à l’université de Neuchâtel, directeur du Laténium, représentant le Laténium
• Claude Mordant, professeur émérite à l’université de Bourgogne, président de l’association pour les recherches sur l’âge du Bronze (APRAB), représentant l’APRAB
• Sandra Pere-Nogues, maître de conférences à l’université Jean-Jaurès – Toulouse, personnalité qualifiée
• Daniel Roger, adjoint au directeur, responsable de la politique scientifique, représentant le musée d’Archéologie nationale
• Martin Schönfelder, chercheur au Römisch-Germanisches Zentralmuseum (RGZM), représentant Barbara Busch, directrice
• Vincent Guichard, directeur général et directeur scientifique de Bibracte, secrétaire du jury (sans voix délibérative)
Les partenariats
Pour cette quatrième édition, l’association Joseph-Déchelette a bénéficié de partenariats avec différentes institutions françaises et européennes :
• le ministère de la Culture / direction générale des Patrimoines
• la ville de Roanne / musée d’archéologie et de beaux-arts Joseph-Déchelette
• le musée d’Archéologie nationale (MAN), Saint-Germain-en-Laye
• le Römisch-germanisches Zentralmuseum, Leibniz-Forschungsinstitut für Archäologie (RGZM), Mayence
• le Laténium, parc et musée d’archéologie, institution de la République et Canton de Neuchâtel (en association avec la fondation Maison Borel)
• l’association pour la promotion des recherches sur l’âge du Bronze (APRAB)
• l’association française pour l’étude de l’âge du Fer (AFEAF)
• la Société préhistorique française (SPF)
• la Prehistoric Society, Londres
• l’European Association of Archaeologists, Prague
ainsi que Bibracte EPCC / Centre archéologique européen, qui a assuré le secrétariat du prix.
Les précédents lauréats du prix
• 2020 : Marilou Nordez
Sa thèse de doctorat soutenue en 2017 à l’université de Toulouse Jean-Jaurès sur L’âge du Bronze moyen atlantique au prisme de la parure : Recherches sur les ornements corporels de France et des régions voisines (XVe-XIVe s. av. notre ère), thèse qui a déjà fait l’objet d’une publication monographique. Elle occupe actuellement un poste de chercheur post-doctoral au sein du programme de recherche Celtic Gold cofinancé par les agences nationales de la recherche française et allemande, ce qui lui permet d’ouvrir son champ de compétence à l’âge du Fer.
• 2018 : Sasja Van der Vaart-Verschoof
Sa recherche doctorale soutenue à l’Universiteit Leiden (Pays-Bas) portait sur les sépultures de l'élite du début de l’âge du Fer des Pays-Bas. Sasja est aujourd’hui consultante indépendante, alliant recherche archéologique et activités éditoriales.
• 2016 : Eneko Hiriart
Sa recherche doctorale soutenue à l’université Bordeaux-Montaigne, portait sur les pratiques économiques et monétaires entre l’Èbre et la Charente entre le Ve et le Ier siècle avant J-C. Eneko a aujourd’hui intégré les rangs du CNRS. Il œuvre au sein du laboratoire bordelais Archéosciences.
Le prix européen d’Archéologie Joseph-Déchelette
Joseph Déchelette, industriel et savant né à Roanne (Loire) en 1862, disparu prématurément sur le front de la Grande Guerre en 1914 à Vingré (Aisne). Joseph Déchelette fut l’un des fondateurs de l’archéologie européenne.
Référence à ce grand savant, le prix vise à mettre en avant les travaux d’un(e) jeune archéologue, en lui apportant son concours, à l’issue de la soutenance de sa thèse de doctorat, un moment critique de la carrière de tout chercheur. À l’issue d’un appel à candidatures mené de novembre 2021 à mars 2022, un jury scientifique international s’est réuni le 6 mai pour départager les 22 candidatures européennes (France, Allemagne, Belgique, Croatie, Espagne, Italie, Royaume-Uni).
Le Prix européen d’Archéologie Joseph-Déchelette a l’ambition de combler un manque : de tels prix sont en effet très rares dans cette discipline scientifique. Ses critères d’attribution comprennent les valeurs qui distinguèrent Joseph Déchelette de son vivant : ouverture d’esprit, dimension européenne de la réflexion, rigueur intellectuelle, sens pratique. Il se veut largement ouvert à la communauté archéologique internationale. Il concerne les jeunes chercheurs ayant soutenu leur thèse de doctorat depuis moins de deux ans, sur un sujet concernant la Protohistoire européenne (âges des métaux). Afin de ne pas établir de restriction sur la langue de rédaction de la thèse, il est demandé aux candidats d’en fournir un résumé en français ou en anglais, ainsi que des perspectives de travail pour l’année suivant l’attribution du prix.
Le prix est doté d’une enveloppe de 10.000 € se répartissant ainsi : le Ministère de la Culture et de la Communication pour 4.000 €, l’association Joseph-Déchelette pour 4.000 € et le Römisch-germanisches Zentralmuseum (RGZM, Mayence) pour 2.000 €. La diversité des partenaires témoigne de l’ancrage européen du prix.
S’y ajoutent plusieurs gratifications en nature sous la forme de séjours de recherche dans des institutions européennes – musée d’Archéologie nationale, RGZM, Laténium (Suisse), Bibracte, sans oublier la bibliothèque du Musée de beaux-arts et d’archéologie Joseph-Déchelette, d’une exceptionnelle richesse.
Le prix est traditionnellement remis au lauréat par le président de l’association Joseph-Déchelette lors des Journées européennes de l’Archéologie dans l’enceinte de la bibliothèque du musée d’archéologie et de beaux-arts Joseph-Déchelette, ancienne bibliothèque du savant.